Comme tous les nouveaux sujets à la mode, le sens au travail emballe les foules. Certains y voient le sujet d’une génération Y/Z un peu trop gâtée, d’autres y voient un buzz passager… D’autres un enjeu global bien plus complexe.
Des questions qui reviennent
Les tâches que vous réalisez chaque jour au quotidien ont-elles du sens ?
Vous sentez-vous stimulé par votre poste et ses réalités ?
Avez-vous le sentiment d’être utile grâce à votre activité professionnelle ?
Ces questions, des milliers de salariés français pourraient se les poser sans réellement trouver les réponses qui leur conviendraient. Et pourtant…. le sens au travail est une question majeure pour les salariés. Toutes les études publiées au cours des dernières années pointent dans la même direction.
En 2017, Deloitte et Viadeo publiaient une étude menée auprès d’un échantillon de plus de 2000 personnes « sens au travail ou sens interdit ».
Les chiffres étaient sans appel : 9 personnes sur 10 considéraient la question du sens au travail comme un enjeu majeur.
Alors, en quoi consiste le sens au travail ?
Il est loin le temps où « gagner de l’argent » était le seul driver de sens au travail.
Les réponses les plus fréquentes aujourd’hui ?
- respect des valeurs,
- utilité des missions,
- éthique,
- compréhension des tâches à accomplir,
- contribution à quelque chose de plus grand que soi
Il n’est donc pas si illogique de voir ceux que la société appelait « l’élite » s’interroger. Un financier nous confiait récemment : « J’analyse des données financières qu’on m’envoie, je les vérifie et les envoie à quelqu’un d’autre, je ne suis ni plus ni moins qu’au milieu d’une chaine. Je me demande si certains cols blancs ne sont pas les cols bleus des nouveaux temps ».
Ces propos ne sont pas si étonnant quand on sait que le sens au travail serait fortement relié à l’activité réelle (29%), aux valeurs de l’organisation (26%) et au travail d’équipe (26%).
Nous étions d’ailleurs interpellés la semaine passée lors d’une conférence « finalement, les notions que vous évoquez ne sont ni plus ni moins que mon entreprise il y a 40 ans ? ». Son entreprise : un géant de l’automobile dont les salariés croisaient le patron dans l’usine. Et il en était fier de son entreprise qui lui avait donné la chance d’évoluer.
Mais alors… doit-on revenir en arrière ? Compliqué.
Dans ce cas, comment aller de l’avant ?
Aujourd’hui, la perception qu’ont les individus de l’importance donnée au sens au travail dans leur propre organisation est de 6/10, avec une disparité importante en fonction des statuts. Les non-cadres se situant à 5,9/10 et les cadres dirigeants à 7,5/10 selon cette étude. Mais demain ? Dans une société qui fera de plus en plus appel à des freelances, quelle est l’importance du sens ? Probablement encore plus fondamentale : il faudra partager avec eux la culture de l’entreprise, leur donner une vision forte et l’envie de poursuivre avec vous. Nul n’ignore la volatilité de ceux qu’on aimerait garder, quand le CDI ne sera plus un frein pour cette nouvelle génération, le sens sera un argument plus que nécessaire à la « rétention » de ceux que vous voulez garder. A l’entreprise de comprendre l’enjeu et de se réinventer, de redéfinir son utilité, de re-responsabiliser son collaborateur. Il n’est plus l’heure de placarder des « slogans » ou des « valeurs » sur les murs sans bien les comprendre, l’entreprise demain doit véritablement en tenir compte.
Ces chiffres illustrent le lien fort qui existe entre la capacité et l’autonomie d’agir sur son travail et le sens que l’on va lui donner. Cet aspect est essentiel car 8 répondants sur 10 estiment que performance et sens au travail sont directement liés.
Pas de reconnaissance, pas de sens !
Cette étude dévoile que 55% des salariés estiment que le sens au travail s’est dégradé. Les éléments qui contribuent le plus à la perte de sens au travail selon les participants sont le processus d’évaluation (40%) et le manque de reconnaissance (43%).
Etre heureux au travail est d’une très grande importance : burnout, bore out (l’ennui au travail) brown out (perte de motivation au travail due à l’absurdité des tâches confiées par l’employeur), toutes ces nouvelles pathologies liées à l’évolution de nos métiers et de nos conditions de travail en font un sujet à placer au cœur de notre société.
Alors que le sens au travail a été un sujet de conversation chez près de 9 personnes sur 10 au cours des six derniers mois, seule 1 sur 2 a abordé ce sujet dans son environnement professionnel. « Une organisation ne doit pas forcément apporter toutes les réponses mais permettre aux salariés de les définir ensemble, estime Philippe Burger, Associé responsable Capital Humain chez Deloitte. L’objectif est que chacun puisse construire le sens qu’il souhaite donner à son travail au sein du collectif, et ainsi améliorer le fonctionnement des organisations. »
Si 81% des répondants estiment que le travail est un facteur d’épanouissement, 75% déclarent aller travailler avec plaisir.